Les avortements provoqués et non sécurisés causent 15 à 20 % des décès maternels au Bénin, selon « l’Evaluation stratégique sur les grossesses non désirées, les avortements et la contraception au Bénin », réalisée par le ministère de la Santé en 2019.

Dans le but de fixer les conditions d’interruption volontaire de grossesse (IVG), le conseil des ministres s’est réuni le mercredi 12 avril 2023, afin d’adopter le décret N° 2023-151 du 19 avril 2023 fixant les conditions d’interruption volontaire de grossesse (IVG).

Pour rappel, en 2021, le Bénin a légalisé la loi No 2021-12 modifiant et complétant la loi No 2003-04 du 3 mars 2003 relative à la santé sexuelle et la reproduction. La loi sur l’Interruption volontaire de grossesse (IVG) a été adoptée par les députés le 21 octobre 2021 puis promulguée par le Chef de l’Etat le 20 décembre 2021.

Selon le texte, l’interruption volontaire de grossesse (IVG) « peut être autorisée » jusqu’à douze semaines, sur prescription médicale, à la demande de la femme enceinte quand la grossesse est la conséquence d’un viol, mais aussi quand elle occasionne une situation de détresse matérielle, professionnelle ou morale pour la femme. Selon les chiffres du gouvernement, près de 200 femmes meurent chaque année au Bénin des suites de complications d’un avortement.

Mais que comprendre concrètement de l’avortement et qu’en est-il de la différence à faire entre celui-ci et l’interruption volontaire de grossesse (IVG) ?

Invité par Lucien Dossou dans l’émission ‘’Que dit la loi ’’ sur Capp Fm ce mardi 25 juillet 2023, le médecin épidémiologiste Raphaël TOTOGNON donne des clarifications.

Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), l’avortement est l’expulsion du produit de conception (œuf) avant 22 semaine d’âge (SA). Au Bénin, la définition retenue est l’expulsion de l’œuf avant la 28ème SA, soit six mois.

A en croire les explications du docteur Raphaël TOTOGNON, on distingue : L’avortement spontané qui survient de lui-même ; L’avortement provoqué qui est induit par une personne ; Lorsque l’avortement provoqué est fait dans les conditions appropriées par un personnel de santé qualifié, on parle d’avortement médicalisé ; Lorsqu’il est fait par un personnel non qualifié et/ou dans des conditions non appropriées, il s’agit d’un avortement à risque ou clandestin.

Ce sont ces avortements qui provoquent le plus souvent des décès maternels. Dans les avortements médicalisés on distingue : Les avortements médicamenteux, appliqués sur la base de l’utilisation de Misoprostol ou autre médicament et les avortements chirurgicaux, par AMIU plus ou moins Curetage.

Mais, comment concevoir que l’on puisse autoriser l’interruption volontaire d’une grossesse dans un pays comme le Bénin où la vie humaine est sacrée ?
Partant de l’historique d’une enquête démographique en santé en République du Bénin dont les résultats ont été rendus public en mai 2018, le docteur Raphaël TOTOGNON rappelle que les rapports ont révélé que l’avortement clandestin est la troisième cause qui tue les femmes au Bénin et qu’avant cela, les enquêtes précédentes ont abouti à la même conclusion. Cependant, les gouvernements qui se sont succédés n’ont pu rien faire pour arrêter le phénomène.

Alors, cette loi No 2021-12 modifiant et complétant la loi No 2003-04 du 3 mars 2003 relative à la santé sexuelle et la reproduction vient à point nommé pour protéger les femmes et filles victimes d’une grossesse non désirée et qui ne remplissent pas les conditions indiquées dans l’article 17 de la loi, mais qui veulent coute que coute s’en débarrasser, les jeunes filles qui sont dans les ateliers d’apprentissage, celles qui sont dans les écoles, dans les lycées, les étudiantes, les jeunes filles vendeuses ambulantes, les ‘’vidomègon’’, la femme dont le mari a voyagé.

Aux termes du décret, l’IVG ne peut se pratiquer que par un médecin, une sage-femme ou un infirmier dûment habilité et dans les formations sanitaires publiques ou privées. Les dernières doivent disposer d’un agrément spécifique délivré par le ministre chargé de la Santé. Tous les établissements de santé doivent remplir les conditions techniques exigées, assurer une prise en charge psychologique et sociale de la patiente avant et après l’intervention.

En outre, il prescrit le secret professionnel pour tout intervenant dans le traitement des demandes et garantit la clause de conscience à ceux dont les convictions religieuses ou philosophiques les empêchent d’y prendre part.

Par ailleurs, les risques particuliers associés à chaque procédure abortive doivent être exposés à la patiente quelle que soit la cause de la sollicitation de l’IVG, de même que son consentement libre, éclairé et renouvelé doit être requis. Ainsi, les ministres concernés assureront la bonne vulgarisation du décret ainsi que son application efficiente.

Bertin Djitrinou